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Le fantasme d’Auguste Choquette

Auguste Choquette était député libéral à Ottawa quand l’unifolié canadien est né dans la douleur, en décembre 1964.

Drapeau canadien -1965

Fier d’avoir participé au vote historique, il s’anime en voyant poindre le 50e anniversaire de la présentation officielle du drapeau canadien le 15 février 1965. Aussi « rêve-t-il tout haut » dans une entrevue au Soleil : « Ce que je nourris comme souhait, ce qui est matérialisable, selon moi, sans blesser les susceptibilités de trop de gens, c’est ceci: ce serait merveilleux de hisser sur la tour du parlement, à Québec, le drapeau du Canada avec celui du Québec ». D’après ce qu’il a confié à la journaliste Brigitte Lavoie, dans Le Soleil du 27 décembre dernier, l’ancien député fédéral aurait même écrit au premier ministre du Québec à ce sujet (http://www.lapresse.ca/le-soleil/actualites/societe/201412/26/01-4831097-rendez-vous-pour-les-50-ans-de-lunifolie.php)

Avant que cette idée saugrenue ne trouve des adeptes au Cabinet et chez les Québécois qui considèrent les drapeaux comme des éléments décoratifs qu’on accroche au gré de ses humeurs, est-il nécessaire de rappeler les dispositions de la Loi sur le drapeau? Article 2 : « Emblème national du Québec, le drapeau doit être déployé sur la tour centrale de l’Hôtel du Parlement ».

Drapeau + Hôtel du Parlement

Le législateur n’a pas jugé bon de dire explicitement « à l’exclusion de tout autre emblème », tellement la chose va de soi. Il a cependant tenu à consigner cette obligation dans la loi en sachant à quel point le Québec peut parfois hésiter à se comporter comme tout État normal, soit exprimer son identité et défendre son champ de compétences (ce que monsieur Choquette inclut probablement dans les « susceptibilités »). On a vu comment le gouvernement du Québec, pendant une décennie, a « oublié » de souligner correctement la journée du drapeau (21 janvier), son emblème national le plus important, alors que le gouvernement fédéral, lui, multiplie le matériel promotionnel et « pédagogique », sans aucune crainte de se faire accuser de propagande. Pire, on maintient au Salon rouge, contre toute logique protocolaire, un drapeau qui n’a rien à voir avec les attributions constitutionnelles du Québec et les compétences législatives de son Assemblée nationale, comme si l’Hôtel du Parlement abritait une succursale du Parlement canadien. N’a-t-on pas déjà assez des municipalités et des universités qui se considèrent comme des créatures du gouvernement fédéral?

Monsieur Choquette peut s’enorgueillir, à juste titre, d’avoir participé à l’adoption de la Loi sur le drapeau et espérer être invité, « le temps d’une cérémonie », à Ottawa, pour ce qu’il appelle « son dernier rendez-vous avec l’histoire politique canadienne », la commémoration des 50 ans de l’unifolié. Il faut cependant que le premier ministre du Québec lui réponde que son gouvernement respecte les champs de compétences définis par son ancêtre Étienne-Pascal Taché, un Père de la Confédération (même s’il est mort en 1865), et qu’il laissera au gouvernement fédéral le soin de célébrer les anniversaires des institutions canadiennes, ce dont il s’acquitte généralement sans peine et sans compter.