Document : 1763-02-17a // 1763-03-04 [date incorrecte]

Références / localisation du document

MAE, Correspondance Politique, Angleterre, vol.449, f. 340ss. // AN, Colonies, C 11 D, vol. 8, folios 242-251 // ANC, MG1-C11D8 ou MG1 - 18 C11D8 (microfilm des originaux F 175, volume 8, p. 242 et suivantes)

Date(s)

1763-02-17a // 1763-03-04 [date incorrecte]

Auteur ou organisme producteur

Duc de Nivernois [Nivernais] // La Rochette

Destinataire

Ministère // Duc de Praslin

Résumé et contenu

Mémoire sur les Acadiens de La Rochette / Nivernais
Bref historique des raisons de la déportation et du trajet des différents groupes acadiens avant d'arriver en Angleterre. Compte-rendu de la visite de la Rochette dans les différents ports anglais où sont réfugiés divers Acadiens ; projets d'établissement en France (Bretagne ; Guyenne ; île de Bouin qui appartient au duc de Nivernais)

Résumé détaillé :
Circonstances de la déportation des Acadiens et relation de leur dispersion en Amérique du Nord et rapatriement d'une partie en Angleterre. Visite de la Rochette dans les différents ports anglais où sont réfugiés divers Acadiens ; projets d'établissement en France (Bretagne ; Guyenne ; île de Bouin qui appartient au duc de Nivernais). La source de la première partie du récit (relation de la déportation) est probablement les Acadiens eux-mêmes

Les Français établis en Acadie, après avoir été cédés aux Anglais, conservaient prêtres, églises, libre exercice de leur religion. Ont conservé attachement le plus profond et tenace pour la France, et sont devenus victimes par leur refus de prêter serment, la formule duquel "attaquait leur religion" (violation du traité). Iniquité de leur "procès".
1/ 1 500 de Virginie regardés comme prisonniers de guerre, renvoyés presque aussitôt à Bristol, pas attendus, attendent trois jours sur des quais exposés à l'air, puis on les met dans des mauvaises bâtisses où on les laisse à l'abandon et beaucoup périssent . 2/ 1 200 au Maryland, dispersés dans les campagnes, conditions misérables. 3/ 2 000 Acadiens en Caroline ; on leur donne des bateaux et on les renvoie ; arrivent dans une colonie irlandaise, on les force à acheter un mauvais bateau. Les Irlandais sont punis par un juge de Virginie, qui envoie une chaloupe aux Acadiens ; ceux-ci réussissent tant bien que mal à réparer leur navire et repartent dans la Baie de Fundy (il en reste 900 / 2 000). Deviennent corsaires. 4/ 4e convoi : Pennsylvanie : naufrage, tous morts.

En Angleterre, beaucoup ont péri. Ils sont détenus dans divers ports (principalement Liverpool). Les Acadiens de Liverpool ont fait parvenir à Nivernais une requête [possiblement du même genre que la fiche @ 000622, mais ce n'est probablement pas celle là précisément puisqu'il est précisé que la requête a été envoyée par un exprès, un Irlandais dont il est parlé plus bas - cf. l'histoire de la lettre à la fin du récit de La Rochette de sa visite à Liverpool] où ils racontent les persécutions qu'engendre leur attachement à la France et réclament la protection du Roi de France, "comme Français et comme malheureux". Envoi de La Rochette. Détail des instructions de ce dernier : 1/ le Roi est au courant de leur fidélité à sa personne et des persécutions que cela a entraîné pour eux ; il les récompensera ; 2/ il faut pour l'instant garder le secret ; 3/ prise d'éclaircissements sur les Acadiens dispersés en Angleterre.

Compte-rendu de la visite de la Rochette (départ 26 déc. 1762) dans les différents ports anglais où sont réfugiés divers Acadiens.
a. Liverpool (arrivée le 31 décembre). Il parle tout d'abord à ceux qui ont envoyé la pétition (pour les rassurer). Joie des Acadiens "vive le Roi" (quelques Anglais scandalisés). Démonstrations vives de joie et bénédiction du Roi et de l'Ambassadeur. Ils expliquent ensuite leur situation : détenus depuis 7 ans (viennent de la Virginie) ; vivent dans un quartier séparé dans des maisons ("ville pour prison") ; reçoivent 6 sols par jour (3 aux moins de 7 ans) [ceci semble difficilement compatible avec ce que décrit Curzon qui prétend que les secours venaient du Roi de France, ou alors il faut imaginer par exemple que le Roi payait une somme globale pour tous les prisonniers de guerre et que par conséquent il ne savait pas [ou La Rochette / Nivernais ne savaient pas] qu'il payait aussi pour les Acadiens ?] ; 336 arrivés, 224 encore vivants ; on essaie de les séduire. Langton dit que la France les ayant abandonnés depuis longtemps, le "Roi d'Angleterre voulait bien les regarder comme ses sujets" ; il leur promet un retour en Acadie avec retour de leurs terres et troupeaux. Réponse des A. : "Ils répondirent tous unanimement qu'ils étaient Français et que c'était au roi de France de décider de leur sort" [contradiction partielle avec fiche @ 816 où les Acadiens de Liverpool demandent la même chose que ceux de Bristol, c'est à dire de retourner en Acadie ; la fiche @ 816 reconnait cependant qu'une lettre des French neutrals, demandant à être de nouveau "under the French governement" a été envoyée]. Langton les traite de rebelles ; menace de les enfermer et de réduire leur paye ; séduction d'un "prêtre écossais directeur des Acadiens" qui convainc 54 des Acadiens (des vieillards) (qui depuis ont écrit à Nivernais pour dire qu'ils ont changé d'avis) ; les autres étaient ébranlés mais action de du Plessis (probablement un non-acadien, prisonnier de guerre, ce qui prouve que les Acadiens ont probablement des contacts avec d'autres prisonniers français) qui les convainc d'envoyer un mémoire à Nivernois. Envoi d'un exprès (un Irlandais catholique marié à une Acadienne dont on ne nous donne pas le nom) à Londres (car Langton ouvre toutes les lettres). Les Acadiens de Liverpool informent Duc de Nivernais qu'il y a d'autres A. dispersés en Angleterre. Nivernais renvoie Rochette [il est probable que La Rochette soit repassé par Londres, puisqu'il va d'abord à Liverpool, puis de Southampton à Penryn [= Falmouth] puis Bristol?]

b. Southampton: 18 janvier 1763. Acadiens sont méfiants (à cause des man?uvres constantes des Anglais - les Acadiens vivent à Southampton, repère des nobles anglais l'été qui travaillent à les séduire - et parce que Rochette n'a aucun signe distinctif). Mais les Acadiens sont zélés pour le Roi. Ils attendent une réponse des commissaires anglais [on ne sait pas précisément quoi ; en fait une réponse sans doute pour savoir s'ils pourront retourner en Acadie]. Ils ont envoyé deux émissaires pour obtenir confirmation de ce que dit Rochette et sont maintenant rassurés. 219 A. sur 319.

c. Penryn [= à cinq kilomètres de Falmouth, près de Penzance, sur la pointe sud extrême de la Cornouaille, localisé sur carte Michelin France] : 25 janvier. 159 A. Le Gouvernement (probablement britannique) a arrêté leur paie depuis fin novembre (mais il est expliqué un peu plus bas que "Cette paie est comme à Liverpool de 6 sols par jour pour chaque personne au dessus de sept ans et de 3 sols au dessous de cet âge", peut-être seulement pour les veuves et orphelins ?). "Ceux qui n'ont appris aucun métier vivent d'emprunts" ; ils sont collectivement endettés. Vivent dans des maisons bourgeoises au milieu de la ville, se sont anglicisés ["leurs jeunes gens en apprentissage chez des ouvriers anglais y ont contracté des inclinations peu françaises"] ; pas très sûr qu'ils vont garder le secret. Pas toujours de bonne volonté.

d. Bristol : 31 janvier [1763]. 184 A. font confiance à La Rochette - "parce qu'ils avaient vu les deux députés qui de Southampton s'étaient rendus auprès de M. le duc de Nivernois" [ce qui paraît assez peu logique puisque Bristol n'est vraiment pas sur la route Londres- Southampton ; prouve en tout cas que le terme "prison anglaise" est exagéré].

Les Acadiens sont méfiants par rapports aux propositions de la France : 1. les A. transportés en France au début de la guerre "y restèrent plusieurs mois sans recevoir aucuns secours" [ceci semble faux] ; 2. "Ils craignent d'être séparés ou transportés dans les Antilles". 3. leurs prêtres (Anglais ou Ecossais) leur disent de renoncer à la "France pays abandonné de Dieu" ; 4. ils "se flattent de retourner en Acadie et d'y jouir du libre exercice de leur religion sous la protection du Roi" (ils ont reçu des lettres d'Acadiens de Boulogne, Saint-Malo et Rochefort qui vont dans le même sens) ; 5. ils veulent que le Roi s'occupe de leurs frères dispersés en Amérique du Nord (près de 10.000, ils ont peur qu'ils meurent de faim ; quelques Acadiens arrivent régulièrement en Angleterre en s'échappant des colonies de N. Angl. ; à l'occasion de l'expédition de Ternay, les Anglais ont refait passer 700 Acadiens qui étaient près de Chibouctou [Chebouctou, près d'Halifax] et d'Halifax en Nouvelle-Angleterre.

Remarques du Duc de Nivernais : si le Roi ne peut pas libérer tous les Acadiens, "ni en les réclamant comme des sujets ni en les rachetant comme des captifs", pour faire revenir ceux-ci, on pourrait tout simplement leur promettre le même traitement que ceux aux Acadiens en Europe [ce qui veut dire qu'il savait que les Acadiens reçoivent déjà des secours en France ? Pas sûr, puisqu'il propose ensuite un traitement particulier à leur accorder, cf. ce qui suit].
Présentation d'un projet qui concilie les intérêts de l'État avec ceux des Acadiens et de l'équité.
Présentation des Acadiens comme tous laboureurs, travail pénible et continuel pour réparer les digues. Aussi fabricants de draps ou de voiles et pêche. Climat rude "quoiqu'au 44e degré de latitude", mais air pur de l'Acadie (par opposition à l'Europe où l'air vicié en a fait périr 600 de maladies]. Il ne faut donc pas les envoyer dans les îles méridionales [Antilles ?] sinon il en mourra trop. De plus, les plantations de sucre, café, indigo "demandent des gens aisés", et Acadiens = pauvres. Peut-être à la rigueur Cayenne [critiquer, c'est assez ridicule, Cayenne est bien pire que les Antilles], mais sont trop pauvres pour les cultures mentionnées ci-dessus, donc il "faudrait bien des années avant que le commerce profitât avec eux ou par eux". Les îles ne conviennent donc pas aux Acadiens et d'ailleurs les Acadiens se défient des îles du Sud ; il faut donc regarder ailleurs.

Suggestion d'établissements en France :
1. Guyenne/Gascogne : grand avantage pour l'État (ça fait longtemps qu'on songe à y faire des défrichements) de placer les Acadiens dans ces "déserts" [sic] ; climat fort différent de l'Acadie, mais sain et sans danger. De plus, il faut placer les Acadiens de préférence près de la mer pour qu'ils établissent un cabotage, même si la côte de Guyenne est "aride, sablonneuse et sujette aux tempêtes", les Acadiens sauront y faire face ;

2. Bretagne : dépeuplée pendant la dernière guerre, pas assez d'habitants ; terre bonne ; bonne pêche peu développée (la pêche au hareng pourrait servir à l'État) ; établissement donc utile pour la Bretagne ; les Etats de Bretagne et la société d'agriculture [selon Martin, note 2 p. 44, c'est la première société d'agriculture crée en France, en 1757] sur place pourrait les aider.

3. un établissement particulier : moins susceptible d'agrandissement que les deux autres. Île de Bouin [Nivernais précise, " sur la côte du Bas Poitou"], sous peuplée. Possibilité de défrichements et de développement de la pêche à la sardine (pourrait faire concurrence aux Anglais) et défrichements seraient très utiles. Climat semblable à l'Acadie [!!]. Les Acadiens d'ailleurs demandent à y aller depuis qu'ils ont appris qu'elle appartient à celui qu'ils considèrent comme leur libérateur. D'ailleurs l'île jouit depuis des temps immémoriaux d'exemption de taxes royales, donc les Acadiens s'y trouveraient plus heureux. Ils seront exemptés de taxes pendant 50 ans (à charge de se défendre eux-mêmes et de construire des canaux, etc?) ; on ne pourra peut-être pas mettre tous les A. (le duc va prendre incessamment des renseignements là dessus), mais une grande partie, le reste pourra aller en Bretagne. Le du Duc serait reconnaissant au Roi s'il décidait les Acadiens pour Bouin, "attendu que ces malheureux sont d'une grande industrie et ont l'attachement le plus grand pour le roi et la France."

Duc de Nivernais suggère ensuite de mettre les Acadiens qui "sont déjà en France ou qui reviendront des colonies anglaises" en Bretagne plutôt qu'en Guyenne, "à cause du climat et de la proximité de leurs frères".
Pour inciter les Acadiens à travailler, Nivernais propose d'imiter l'exemple des colonies anglaises où l'on divise les terres par famille et on leur donne des animaux, on distribue des vivres et des semences, instruments de labours et matériaux pour bâtir ; on exempte d'imposition pendant 50 ans, etc. "Ces établissements sont coûteux sans doute, mais c'est une avance faite par le gouvernement dont les sujets retirent tous les ans un intérêt qui ne cesse d'augmenter et qui rentre au gouvernement sous différentes formes par l'accroissement de la population et de la consommation."
Enfin, État des Acadiens = nombre d'Acadiens dans les villes d'Angleterre. + 2 estimations : nombre d'Acadiens en France et nombre d'Acadiens en Nouvelle-Angleterre avec la nota suivante : "on ne garantit pas l'exactitude des deux dernières évaluations que l'on ne tient que des Acadiens d'Angleterre." [ce qui voudrait dire que Nivernais et La Rochette ignorent le nombre des Acadiens en France?]


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Mémoire sur les Acadiens du Duc de Nivernois [ou de la Rochette]

Les Français Acadiens connus aussi sous le nom de Français Neutres étaient établis sur la rivière d'Annapolis où ils formaient une peuplade d'environ 3,000 familles. Cédés aux Anglais par la paix d'Utrecht, ils avaient conservé avec leurs églises et leurs prêtres le libre exercice de leur religion. Ils conservèrent aussi l'attachement le plus profond et le plus tenace pour la France, et c'est de ce sentiment qu'ils sont aujourd'hui la victime. L'Angleterre les regarda comme des séditieux parce qu'ils ne voulurent jamais prêter le serment qu'on exigeait d'eux. La formule de ce serment attaquait leur religion et leur religion leur était garantie par le traité. Mais leurs juges étaient en même temps leur partie. Leur procès fut jugé sans être instruit et l'ordre fut donné de transporter les Acadiens dans les diverses colonies anglaises.

Quinze cents débarquèrent à la Virginie. Ils y furent regardés comme des prisonniers de guerre et on les renvoya presque aussitôt en Europe dans les premiers transports qui firent voile. Arrivés en Angleterre, et dispersés dans tous les ports de ce royaume, ils y périrent presque tous de misère et de chagrin. Trois cent abordèrent à Bristol où ils n'étaient point attendus, car on ne les attendait nulle part. Ils passèrent trois jours et trois nuits sur les quais de la ville exposés à toutes les injures de l'air. On les renferma à la fin dans quelques édifices ruinés où la petite vérole [sic, au lieu peut-être de variole] acheva de détruire tous ceux qui n'avaient pas succombé à la fatigue et au désespoir.
Douze cents autres de ces malheureux furent envoyés au Maryland. Ils y arrivèrent au mois de décembre et souffrirent durant trois semaines toutes les rigueurs du froid et de la faim. On les dispersa ensuite dans les campagnes, où les plus robustes servirent de journaliers et où les vieillards et les infirmes vécurent d'aumône.
Un troisième détachement beaucoup plus considérable que les deux premiers aborda à la Caroline. Les habitants de Charleston et des autres ports ne voulurent point recevoir les Acadiens. Ils leur donnèrent deux vieux vaisseaux, une petite quantité de mauvaises provisions et la permission d'aller où ils voudraient, embarqués dans ces vaisseaux qui faisaient eau de toutes parts, ils échouèrent bientôt sur les côtes de la Virginie, près d'Hampton, colonie Irlandaise. On les pris d'abord pour des ennemis qui venaient piller, ensuite pour des pirates, et enfin pour des hôtes dangereux dont il fallait se défaire. On les força d'acheter un vaisseau. Tout l'argent qu'ils purent rassembler entre eux se montait à 400 pièces de huit, et ce fut le prix qu'on leur demanda. Ce vaisseau valait encore moins que ceux qu'ils venaient de quitter et ils eurent toutes les difficultés du monde à se faire échouer une seconde fois à la côte du Maryland. Il serait injuste d'oublier de dire ici qu'un des magistrats de la Virginie, ayant appris la perfidie qu'on avait exercée contre ces malheureux, fit punir les habitants du village d'Hampton et qu'il envoya une chaloupe après les Acadiens pour les faire revenir et les instruire de l'état de leur vaisseau. Les débris de leur naufrage furent alors la seule ressource qu'ils eurent à espérer et ils passèrent deux mois sur une rive déserte à raccommoder leur vaisseau. Ils réussirent à la fin, et après avoir remis en mer pour la troisième fois, ils eurent le bonheur d'aborder dans la baie de Fundy (le nom que nous donnons à cette baie est celui de Baie Française) où ils débarquèrent près de la rivière St-Jean, réduits à 900 de plus de 2,000 qu'ils étaient à leur départ d'Acadie. Ce sont eux qui ayant dans la suite armé un corsaire se rendirent redoutables à tous les vaisseaux anglais qui naviguaient dans ces parages.
Le quatrième transport d'Acadiens que l'on avait destiné pour la Pennsylvanie eut moins à souffrir que ceux dont on vient de parler, une tempête ayant englouti leur bâtiment mit fin tout d'un coup aux misères qui les attendaient.
Parmi ceux qui ont été transportés en Angleterre, un grand nombre a succombé à la misère et aux maladies qu'elle entraîne. Ceux qui y ont échappé sont détenus dans divers ports d'Angleterre et principalement à Liverpool. Ceux-ci ayant fait parvenir à M. Le Duc de Nivernois une requête dans laquelle, après lui avoir rendu compte des persécution que leur attachement pour la France, ne cessait de leur attirer, ils réclamaient sa protection, et comme Français et comme malheureux. Son excellence jugea à propos de leur dépêcher secrètement M. de la Rochette avec les instructions suivantes :
1° D'assurer les Acadiens que le roi était instruit de leur zèle inviolable pour sa personne ainsi que des malheurs auxquels ce zèle les avait réduits, et qu'à la Paix S.M. les récompenserait comme de bons et de fidèles sujets, en quelques parties de ses Etats qu'ils vinssent à s'établir.
2°De les assurer qu'ils pouvaient compter sur l'entière protection de son Excellence, mais que le moment n'étant pas encore venu de la rendre publique, la circonspection et le secret étaient indispensables.
3°De prendre tous les éclaircissements nécessaires tant à l'égard des Acadiens de Liverpool que de ceux qui pouvaient être dispersés dans les autres villes d'Angleterre.

Le Sieur de la Rochette partit le 26 décembre 1762 et arriva à Liverpool le 31. Il se transporta au quartier des Acadiens, et après s'être fait connaître à ceux qui avaient envoyé la requête à M. le Duc de Nivernois, en leur produisant cette même requête, il leur fit part de sa mission et des ordres qu'il avait reçu de son Excellence. Quelques précautions qu'il eut prises pour les engager à modérer leur joie, il ne put empêcher que les cris de "vive le Roi" ne se fissent entendre de leur quartier au point même que quelques anglais en furent scandalisés. Les larmes succédèrent à ces premières acclamations, et les hommes et les enfants disaient tous en pleurant d'allégresse : "Dieu bénisse notre bon Roi" [souligné dans le texte]. Plusieurs semblaient entièrement hors d'eux-mêmes : ils battaient des mains, les levaient au ciel, se frappaient contre les murailles et ne cessaient de sangloter. Il serait impossible enfin, de décrire tous les transports auxquels ces honnêtes gens s'abandonnèrent. Ils passèrent la nuit à bénir le roi et son ambassadeur et à se féliciter du bonheur dont ils allaient jouir.

Lorsqu'ils furent revenus de ce premier ["point", selon Brasseaux] excès de joie, le Sieur de la Rochette obtint d'eux les éclaircissements suivant sur leur situation actuelle.
Depuis sept ans on les a détenus dans la ville de Liverpool où ils ont été transportés de la Virginie, quelques mois après leur arrivée on leur assigna un certain nombre de maisons dans un quartier séparé en leur donnant la ville pour prison. On assigna pareillement une paye de six sols par jours à tous ceux qui avaient plus de sept ans et de trois sols aux enfants au dessous de cet âge .
Ils arrivèrent à Liverpool au nombre de 336 et ils sont réduits aujourd'hui à 224. Pendant les sept années de leur détention on les a peu inquiétés : mais depuis que la paix est décidée on ne cesse de travailler à les séduire. Langton commissaire anglais des prisonniers français les fit paraître devant lui dans les premiers jours de décembre et leur représenta que la France les ayant abandonné depuis si longtemps, le Roi d'Angleterre voulait bien les regarder comme ses sujets, et qu'il les renverraient en Acadie où on leur rendrait leurs terres et leurs troupeaux. Ils répondirent tous unanimement qu'ils étaient Français et que c'était au roi de France de décider de leur sort. [ceci contredit la version donnée par Vinter selon laquelle les Acadiens auraient d'abord demandé à passer en Acadie ; enfin, non, peut-être pas, lire la suite : la pétition est peut-être le résultat du travail de séduction du prêtre écossais ; en fait, voir surtout le rapport du 4 janvier 1763 qui contredit cette version, sauf s'il s'agit des 54 personnes mentionnées ci-dessous]

Le commissaire les traita de rebelles. Il les menaça de les faire enfermer et de réduire leur paye ; mais comme rien ne les intimidait, il eut recours au moyen qui par l'attachement qu'ont les Acadiens pour leur religion semblait infaillible.
Il séduisit un certain prêtre écossais directeur des Acadiens, en lui promettant la place de curé principal des villages catholiques d'Acadie
Cet homme leur prêcha des sermons scandaleux, et 54 parmi lesquels sont presque tous les vieillards (tous ceux là ont écrit depuis à M. le Duc de Nivernais pour le supplier de les réclamer comme sujets du roi) se déterminèrent d'après ces sermons à repasser dans leurs pays. On doit dire cependant qu'ils n'ont voulu signer aucun des écrits que le commissaire leur a fait présenter. Le reste au nombre de 170 personnes faisant 38 familles était presque ébranlé et aurait suivi cet exemple sans le nommé Normand du Plessis, pilote français né au Havre et rançon à Liverpool pour M. de la Touche, de la Martinique.

Duplessis engagea les Acadiens à présenter une requête à M. le Duc de Nivernois avant de se laisser aller aux insinuations du commissaire et du prêtre. Ils s'y déterminèrent, mais comme le commissaire ouvre toutes les lettres qu'ils écrivent ou qu'ils reçoivent, ils firent entre eux une contribution de quatre guinées pour envoyer un exprès à Londres. Cet exprès fut un Irlandais catholique marié à une Acadienne, sa femme a été privée de sa paie de 6 sols depuis son mariage, et qui demande pour sa récompense qu'on veuille bien lui permettre de suivre les Acadiens partout où il plaira au Roi de les établir.
Les dits Acadiens détenus à Liverpool ayant fait savoir à M. le Duc de Nivernois qu'il se trouvaient encore près de 600 de leurs frères à Southampton, Penryn et Bristol, son Excellence donna ordre au Sieur de la Rochette de se rendre secrètement dans ces trois villes et d'y faire usage des instructions qu'il avait reçues pour Liverpool au mois de Décembre 1762.

M. de la Rochette arriva à Southampton le 18 janvier 1763. Comme il n'avait aucune marque à laquelle les Acadiens dussent le reconnaître et que d'ailleurs les artifices répétés des Anglais engageaient ce peuple à la plus grande méfiance, il ne put les convaincre ni de la réalité de sa mission ni de celle des ses instructions. Il les quitta cependant satisfait de leur zèle pour le roi et persuadé que l'excès de ce même zèle était l'unique motif de leur défiance. Plus voisins de Londres que leurs frères et placés dans une ville qui devient en été le rendez-vous d'une partie de la noblesse anglaise, les Acadiens de Southampton avaient essuyé des attaques plus fréquentes et plus dangereuses. Le Général Mordaunt, et même en dernier lieu le Duc d'York, n'avaient pas cru au dessous d'eux de les solliciter de renoncer à la France. D'ailleurs, dans le moment où M. de la Rochette leur fut envoyé, ils attendaient une réponse de la part des Commissaires anglais accoutumés à les tromper, et c'était pour eux une raison de défiance très légitime. Ils prirent le parti de dépêcher deux des leurs à M. le Duc de Nivernois pour l'assurer de la vérité, et il ne leur reste aujourd'hui aucun doute. Ces Acadiens se trouvent réduits à 219 de 340 qu'ils étaient à leur débarquement en Angleterre.

De Southampton, M. de la Rochette partit pour Penryn, où il se rendit le 25 janvier. Il y trouva 159 Acadiens dans la situation la plus déplorable. Depuis la fin de novembre le gouvernement a arrêté leur paie. Ceux qui n'ont appris aucun métier vivent d'emprunts ; les veuves et les orphelins demandent l'aumône, et ils doivent entre eux plus de 250 guinées dans le bourg. Cette paie est comme à Liverpool de 6 sols par jour pour chaque personne au dessus de sept ans et de 3 sols au dessous de cet âge [apparente contradiction avec la phrase précédente où les secours ont soi-disant été supprimés]. Les Acadiens de Penryn ne demeurent point dans un quartier séparé. Ils sont distribués dans diverses maisons bourgeoises, et d'ailleurs plusieurs de leurs jeunes gens en apprentissage chez des ouvriers anglais y ont contracté des inclinations peu françaises ; ainsi, il y a lieu de craindre que le secret exigé par M. de la Rochette n'ait pas été observé avec autant d'exactitude que dans les autres villes. Il faut dire aussi que plusieurs d'entre eux ajoutant peu de foi aux assurances qui leur étaient données, leur bonne volonté n'a pas été unanime.

Le Sieur de la Rochette arriva à Bristol le 31 janvier. Il y trouva les Acadiens au nombre de 184 personnes qui s'abandonnèrent entièrement à la protection du Roi. Ils n'eurent aucune peine à prendre confiance en M. de la Rochette, parce qu'ils avaient vu les deux députés qui de Southampton s'étaient rendus auprès de M. le duc de Nivernois.
Il y a eu une défiance générale qui prévaut plus ou moins chez tous les Acadiens et dont voici les principaux motifs :
1. Leurs frères qui furent transportés en France au commencement de la guerre y restèrent plusieurs mois sans recevoir aucuns secours . Ils craignent d'éprouver le même sort en arrivant dans le royaume.
2. Ils craignent d'être séparés ou transportés dans les Antilles
3. Leurs prêtres actuels qui sont Anglais ou Ecossais et que l'on a flattés de l'espérance de devenir leurs curés en Acadie, ne cessent de les exhorter à renoncer à la France qu'ils leur représentent comme un pays abandonné de Dieu.
4. Ils se flattent toujours de retourner en Acadie et d'y jouir du libre exercice de leur religion sous la protection du Roi. Ceux même qui sont en France, à Boulogne, Saint-Malo et Rochefort persistent dans cette opinion et l'ont même écrit aux Acadiens qui sont en Angleterre.
5. Ils craignent que le Roi n'abandonne leurs frères dispersés dans les colonies anglaises du continent septentrional de l'Amérique. Ceux-là forment le plus grand nombre, et ils sont plus de 10 000 qui meurent de faim.
De temps en temps il s'en sauve quelques uns en Europe, et deux familles de ces malheureux sont arrivés il y a quelques semaines de Boston à Bristol. Les Anglais cependant en transportent tous les jours, et lorsque le Chevalier De Ternay s'empara de Terre-Neuve, ils en firent passer à la Nouvelle-Angleterre (où il y en a déjà un grand nombre) sept cents qui se trouvaient encore à Chibouctou, Halifax, et aux environs.

Dans la supposition que le roi ne pourrait délivrer tous ces Acadiens dispersés, ni en les réclamant comme des sujets ni en les rachetant comme des captifs, il est certain que l'on peut toujours en faire revenir la plus grande partie, en faisant assurer secrètement à tous ceux qui s'échapperont, le traitement accordé aux Acadiens aujourd'hui en Europe.
A l'égard du traitement à leur accorder, voici une idée que je crois bonne, parce qu'elle me parait concilier les intérêts de l'Etat avec ceux des Acadiens et ceux de l'équité. Avant de la proposer, je vais en développer brièvement les motifs.
Il faut savoir que les Acadiens étaient tous laboureurs et pêcheurs, tous adonnés à un travail et à une industrie pénibles. Leurs terres exigeaient une culture assidue. Ils étaient occupés continuellement à élever ou réparer des digues pour empêcher la mer de les submerger, et dans les intervalles de relâche ils fabriquaient des toiles ou des draps ou allaient à la pêche. D'ailleurs, les Acadiens, dans un climat très rude, quoiqu'au 44e degré de latitude, jouissaient d'un air très pur et connaissaient très peu de maladies. Leur expatriation en Europe en a fait périr plus de 600 de la petite variole seulement, dont ils n'avaient aucune idée dans leur pays. Si on les établissait dans nos îles méridionales, il est indubitable que l'on n'en conserverait pas la moitié. Ce ne sont pas d'ailleurs des colons pauvres qu'il faut à ces îles, les plantations de sucre, de café, d'indigo et de coton demandent des gens aisés, et il n'y a pas un Acadien qui ne soit à la mendicité. La colonie de Cayenne est peut être le seul endroit où l'on pourrait les placer avec un certain avantage, mais la ressource des Acadiens placés dans cette colonie serait uniquement dans les plantations de cacaotiers, celles de sucre, d'indigo, etc. etc. leur étant interdites par leur pauvreté, et il faudrait bien des années avant que le commerce profitât avec eux ou par eux.
Ainsi le climat et la nature de la cultivation et de l'industrie dans nos colonies méridionales ne convenant pas aux Acadiens, et ces peuples ayant même à cet égard un préjugé de répugnance, il semble nécessaire de tourner ses idées d'un autre côté, et c'est ce qui m'a inspiré celles dont je vais rendre compte.
1° On parle depuis longtemps en France de l'utilité qu'il y aurait à opérer le défrichement des landes de Guyenne et de Gascogne, et personne ne doute que ce ne fut un grand avantage pour l'Etat ; or, les Acadiens pourraient servir à former un établissement si salutaire ; et, en les plaçant dans ses déserts, on tirerait un bon parti d'eux et de leur industrie. Le climat de la Guyenne est à la vérité fort différent de celui de l'Acadie, mais il est sain, et l'on peut croire que les nouveaux colons pourraient s'y habituer sans danger. Au reste, il faut avoir l'attention de placer les Acadiens dans des parties qui avoisinent la mer et d'y former quelque havre, parce qu'alors ils auront bientôt établi un cabotage qui leur produira une nouvelle ressource. Il est vrai que la côte de Guyenne est aride, sablonneuse et sujette aux tempêtes, mais l'industrie et le labeur des Acadiens pourraient tout réparer et vaincre les plus grands obstacles.
2° La province de Bretagne a éprouvé une dépopulation sensible par la quantité de soldats et de matelots qu'elle a fournis à l'Etat pendant cette guerre. Cette province à des avantages dont le défaut de population l'empêche de profiter. Le sol y est bon, la côte abonde en poisson ; la pêche du hareng pourrait y devenir une branche de commerce considérable et utile à l'Etat, cependant il y a dans cette province une quantité immense de terrain inculte. La pêche n'y fait point une branche de commerce et fournit à peine à la consommation du pays. L'établissement des Acadiens dans cette province lui serait sans doute très utile, et les Acadiens y trouveraient peut-être plus d'avantage que dans toute autre province. Les Etats pourraient concourir avec le gouvernement au prompt établissement de ces nouveaux colons, et la société d'agriculture qui y est établie pourrait leur fournir les moyens d'étendre leur industrie.
3° Il y aurait un établissement particulier à proposer pour les Acadiens prisonniers en Angleterre. Cet établissement, quoique moins susceptible d'extension que les deux autres, aurait cependant certains avantages. L'île de Bouin, sur la côte du Bas Poitou, n'est peuplé ni à proportion de sa grandeur, ni en raison de ses ressources. Si on y plaçait les Acadiens actuellement détenus en Angleterre, les parties incultes de cette île se défricheraient et la pêche qui se fait aux environs, acquerrait une grande activité. On sait que cette pêche est celle de la sardine, objet d'autant plus important pour nous que c'est un des articles essentiels du commerce des Anglais qui exportent une quantité prodigieuse de ce poisson séché sur les côtes de Cornouailles.
De toutes les îles sur les côtes de France, le climat de celle de Bouin, est celui qui ressemble le plus à l'Acadie et qui par cette raison peut le mieux convenir aux Acadiens. D'ailleurs, ces malheureux prisonniers qui ont appris que l'île de Bouin appartenait au Duc de Nivernois, désirent avec passion de passer de préférence dans cette île dont il est seigneur, parce qu'ils le regardent comme le libérateur de leur captivité en Angleterre et qu'ils ne connaissent que lui. D'ailleurs, l'île de Bouin, jouissant de temps immémorial de privilèges renouvelés successivement par tous nos rois, et en vertu desquels privilèges les dits insulaires ne sont soumis à aucune imposition ni corvée à la charge de se défendre eux-mêmes et d'entretenir les digues et canaux d'où dépend l'existence de l'île, les Acadiens s'y trouveraient plus heureux et y seraient par conséquent plus utiles. Il suffirait, pour vivifier l'île de Bouin, et la pêche qu'elle peut exploiter, d'y placer les Acadiens qui sortiront d'Angleterre. Peut-être même la totalité ne pourrait-elle pas être placée et le Duc de Nivernois prendra sur cela incessamment un éclaircissement positif, alors le surplus refluera en Bretagne où ils seraient fort bien pour eux et pour l'Etat.
Le Duc de Nivernois ne cachera pas ici qu'il serait fort flatté si S.M. avait la bonté de décider le sort du petit nombre des Acadiens qui sont en Angleterre en faveur de l'île de Bouin, attendu que ces malheureux sont d'une grande industrie et ont l'attachement le plus grand pour le roi et la France.
A l'égard de ceux qui sont déjà en France ou qui reviendront des colonies anglaises, l'avis particulier du Duc de Nivernois serait aussi qu'on les mit plutôt en Bretagne qu'en Guyenne, à cause du climat et de la proximité de leurs frères qui seraient dans l'île de Bouin, laquelle n'est qu'à 8 lieues de Nantes.
Au surplus, quelque part qu'on place les restes de ce malheureux et respectable peuple, il sera nécessaire par politique ainsi que par équité, d'encourager leur zèle et leur industrie. Le duc de Nivernois propose, pour parvenir à cet objet nécessaire, d'imiter la pratique constamment suivie des Anglais lorsqu'ils établissent des Colonies. Ils divisent le terrain en autant de portions qu'il y a de centaines de familles et subdivisent chaque portion en cent lots. Chaque famille a des vivres pour la première année et de la semence pour la seconde, des instruments de labourage et des instruments et matériaux propres à bâtir. On lui donne de plus une vache ou une jument ou deux truies et cinq brebis à son choix, et l'on distribue un taureau et un étalon pour chaque centaine de familles. Enfin, la colonie est exempte de toutes impositions pendant 50 ans. Ces établissements sont coûteux sans doute, mais c'est une avance faite par le gouvernement dont les sujets retirent tous les ans un intérêt qui ne cesse d'augmenter et qui rentre au gouvernement sous différentes formes par l'accroissement de la population et de la consommation.

Etat des Acadiens.
En Angleterre : A Liverpool : 224 ; à Southampton : 219 ; à Penryn : 159 ; à Bristol : 184 ; Pris à bord des corsaires environ 80.
France - à Rochefort, Boulogne, St-Malo etc... : 2 000
Dans la Nouvelle-Angleterre, le Maryland, la Pennsylvanie, la Caroline, etc. etc. : 10 000
Total : 12 866.

Nota : on ne garantit pas l'exactitude des deux dernières évaluations que l'on ne tient que des Acadiens d'Angleterre.

Notes

Document consulté le 17 juin 2003 au MAE. voir aussi notes ProCite # 1184
1. AN, Colonies, C 11 D, vol. 8, folios 242-251. [consulté aux ANC le 25 octobre 2003 sur le microfilm F-175]
2. BRASSEAUX, Carl A., "Phantom Letters: Acadian Correspondence, 1776-1784", Acadiensis [Canada], 23(2), (1994 ) : 124-32. [à noter que sa transcription est en ancien français, et seulement des extraits]
3. Rapport sur les archives canadiennes, 1905, vol. II, p. 209-215, annexe G [photocopie # 1184]
4. résumé et cité en partie dans Martin (1936, p. 37 et suivantes)
5. partiellement résumé dans Vinter # 77
6. Repris dans Premiers Chapitres (passages en gras)
7. repris plus ou moins tel quel dans Winzerling # 111
deux dates pour ce document : à vérifier : 1763-02-00 - ou 1763-03-04 ; peut-être plutôt antérieur au 3 mars, car les instructions de Choiseul (fiche @ 848)

Ce texte est transcrit à partir du Rapport des Archives publiques du Canada, 1905, p. 212 [cf. photocopies # 1184] ; Dscn8607.jpg et suivantes ; j'ai aussi comparé en le transcrivant depuis les photos du RAPC avec les photocopies de Brasseaux.

Notes préliminaires du RAPC : M. le Duc de Nivernois, déclarait dans un mémoire du 4 mars 1763 qu'il restait encore 866 Acadiens en Angleterre, distribués dans les villes de Liverpool, Southampton, Penryn et Bristol. Il proposait d'en fixer un certain nombre sur l'île de Bouin qui lui appartenait et de distribuer le reste sur les côtes de Bretagne.
Mémoire sur les Acadiens [note : ce document est donné ici en orthographe moderne, d'après une copie tirée de l'original par Edouard Richard pour son propre usage. L'original est au folio 340 du vol. 449 du Fonds Angleterre, au ministère des Affaires Etrangères, à Paris]

A noter que ce premier projet d'établissement comprend déjà beaucoup d'idées qui seront reprises plus tard (par exemple l'idée d'utiliser les colons en Guyane - à Cayenne, c'est, selon l'auteur, la seule colonie qui leur conviendrait, mais il ne recommande pas de les y envoyer parce que cela prendrait du temps avant qu'ils s'y enrichissent tant ils sont pauvres) ; il faut dire qu'il cherche surtout à convaincre de les installer sur l'île de Bouin qui lui appartient (c'est un territoire qui est exempté d'impositions) ;
c'est lui qui suggère d'envoyer les Acadiens en Bretagne (car la Bretagne s'est dépeuplé et a un fort potentiel + il ne faut pas éloigner les Acadiens les uns des autres) ;
les Acadiens sont déjà méfiants par rapport aux propositions françaises ; les Anglais essaient de les séduire (notamment les nobles anglais en "vacances" à Southampton).

Mots-clés

// UK
// Guyane
// culture : prêtres, églises, religion
// culture : ceux de Penryn se sont anglicisés
// culture : Nivernais s'intéresse surtout à leur adaptation au climat (juge que pas adaptés aux îles méridionnales) ;
// culture : Ni

Numéro de document

000038