Document : 1768-00-00

Références / localisation du document

BM Bordeaux, Manuscrit MS 1480, Annexes, 1er Dossier : Mémoire et lettres de 1766 à 1774.

Date(s)

1768-00-00

Auteur ou organisme producteur

papiers de Lemoyne ; mémoire individuel : auteur probable : Heraud

Résumé et contenu

Mémoires concernant le partage du communal de Blaye.

Le premier mémoire décrit l'usurpation par de nombreuses personnes ou de plusieurs villages d'une partie dudit communal, et les besoins de compenser les villages si on prend les terres communales. Il s'agit de rationaliser (notamment en traçant des chemins droits, en plantant des arbres) l'utilisation de ces terres laissées selon l'auteur à l'abandon (ou pire, laissées au pillage) ;
montrent notamment la résistance des populations locales à expropriation des terres (phénomène de l'"enclosure anglais" est rejeté). Moyens également de ménager les différentes personnes qui ont des "droits" sur le terrain : les ecclésiastiques notamment (prélèvement de la dîme) ; but de ces défrichements: le bien public

Le mémoire de Héraud présente d'abord l'origine du projet selon une rhétorique courante : les terres étaient incultes et vides, le Roi a ordonné en 1764 leur défrichement ; Boutin, intendant de Bordeaux a chargé Héraud (l'auteur du mémoire) de procéder à l'étude de la faisabilité de l'application de l'arrêt du conseil (càd le partage des terres). Héraud se lance lui-même dans la culture d'une portion du communal, qu'il espère bien sûr acheter (ou qu'on lui donnera) lors de la vente de ce terrain. Mais il suscite l'hostilité de la population par sa volonté de faire appliquer l'arrêt du conseil. La population décide de dévaster les terres qu'il a défrichées au moment où son protecteur, Boutin, est loin, à Paris. Il décrit la procédure judiciaire qui suit, il gagne en première instance, mais les communes se portent en appel et il décide de renoncer car il n'est pas noble ? Suivent deux tableaux.

Le mémoire est (un peu) commenté en marge par quelqu'un (probablement Lemoyne)
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4e liasse. f° 10.

Communal de Blaye, 1768.
Mémoire sur le communal du Comté de Blaye.

DSCN0188.JPG On envisage beaucoup de difficultés pour parvenir au partage du communal, si du moins on veut suivre l'avis du conseil intervenu le 3 mars 1764.
Par le plan et arpentage qu'en a fait M. de la Cour [?] ingénieur géographe, les 7000 journaux [Delsalle : étendue parcellaire qu'un homme peut parcourir en une journée] se trouvent réduits à 4882 j. 12 carreaux de manière qu'il y a de manque ou d'usurpé 2117 j. 60 carreaux.
On se persuade que pour réussir et parvenir au partage et au défrichement, il conviendrait d'abandonner aux 6 paroisses qui sont les seules des 25 qui bordent et contenter [? ; compenser ?] les communes [le dit communal] en nature de Landes et en communaux pour servir de pacage à leurs bestiaux, dans le goût (?) et suivant l'état de division ou partage qu'on joint au premier mémoire. Savoir [suivent les noms de 6 paroisses avec les surfaces correspondantes en face, dans un tableau, pour un total de 1092 journaux].
On pourra ensuite vendre tout le surplus du dit (?) communal montant à 3789 journaux 48 (?) qui doivent revenir aux 19 autres paroisses qui se trouvent trop éloignées pour pouvoir en profiter.
Mais il sera très à propos avant de faire cette opération et pour savoir à quoi s'en tenir, de fixer, limiter, et aligner les chemins publics et royaux qui y sont déjà établis, mais qui ont beaucoup de sinuosité, leur donner au moins 40 pieds de largeur, et des fossés de chaque côté de 6 pieds de largeur, lesquels fossés seront faits aux frais et entretenus par les possesseurs, il sera nécessaire avant que de faire aucune vente de tracer sur le local du communal DSCN0189.JPG tous les chemins. Quant aux frais qui ont été faits précédemment et ceux qui seront faits à l'avenir, ils doivent être remboursés par la vente qui sera faite du dit communal, on accordera aux particuliers qui auront fait des avances du terrain proportionnels à ce qui leur sera dû.
Il sera fort intéressant d'insérer dans les contrats et concessions que les tenanciers ou preneurs [?] feront planter à leurs frais des chênes, qui réussissent très bien dans le sable, à 20 pieds de distance les uns des autres, sur les levées des fossés de leurs possessions, qui confronteront [DHLF : "déterminer les limites d'un chemin"] les chemins, lesquels arbres tourneront à leur profit, ne pourront cependant couper sans en avoir obtenu la permission de la maîtrise des eaux et forêts.
Cette opération faite on procédera à la vente du reste du dit communal en faisant des lots ou portions, de la manière qu'on croira la plus convenable pour en faciliter la vente. M. l'intendant nommera un trésorier pour toucher les sommes provenant après la vente totale, et les fonds rentrés, on distribuera et remettra à chacune des paroisses ce qui leur reviendra, à proportion de leurs habitants.
Il sera bien plus aisé de partager les deniers provenant de ces ventes que de diviser le terrain, ce qui pourrait se pratiquer à la charge toujours des trois deniers et rente par journal, au profit du Roi comme l'impose l'arrêt du conseil du 3 mars 1764.
A l'égard de 2117 journaux 60 carreaux (?) qui se trouvent par l'arpentement usurpés sur le dit communal, faire ordonner qu'il seront concédés un prix qui en sera réglé par M. l'intendant. Par là on évitera des discussions qui ne manqueraient pas d'y avoir si on ne prenait ce parti ; un curé des dites 6 paroisses d'Etaulier, Cartelègue, Campagnou, Générac, [etc... (?)], à qui reviendront les dîmes, ne peuvent les exiger suivant l'arrêt du conseil de 1764 que dix ans après les défrichements ou la date du contrat et concession ; cependant, pour donner à ces ecclésiastiques plus de tranquillité, je serais de leur laisser prendre la dîme 4 ans après la date des concessions de 30 gerbes une, comme l'établi l'arrêt du conseil de 1647. [en marge : je crois que l'auteur du mémoire entend pour les terrains... et non pour ceux qui seront concédés en de nouveaux établissements.]

Il sera aussi nécessaire que sa majesté ait la bonté d'accorder DSCN0191.JPG f° 11 [suite] aux cultivateurs les exemptions de tailles, prérogatives, et pendant 10 ans comme il en porté (?) par les arrêts du conseil de 1764.
On a joint au présent mémoire copie de l'ordonnance de M. l'intendant du 17 juillet 1765, un projet d'arrêt du conseil et les délibérations prises par les habitants des 21 paroisses. Il n'y a que celles de Saint-Sauveur, Saint-Romain, St Luc et Saint-Martin qui n'ont pas délibéré. On joint aussi le procès-verbal qui a commencé le 17 mai 1765 et finit le 4 juillet de la même année pour l'arpentement et le plan [pas retrouvé]. On joint aussi l'Etat de la distribution des 4882 journaux 12 carreaux en faveur des 25 paroisses en égard à la quantité de leurs habitants, et l'Etat de la quantité des bestiaux qu'il peut y avoir dans chacun des 6 paroisses qui confronte le communal [ces deux tableaux se trouvent ci-dessous].
Il sera aussi fort intéressant pour détruire les oppositions indécentes et mal fondées, faites par les dites (?) délibérations, et afin d'en éviter à l'avenir de nouvelles, que M. l'intendant obtienne un nouvel arrêt du conseil, avec des lettres patentes et qu'il soit fait mention dans les dits arrêts de la quantité des communaux qu'on doit laisser à chacun des six paroisses du comté de Blaye.
Ce sera le moyen le plus sûr de [rendre taisant ?] les gens mal intentionnés, qui ne désireraient pas mieux que le défrichement des communal n'eut pas lieu ; ce serait cependant un très grand avantage pour l'Etat et le public, qu'il fut mis en nature ces terres labourables, près, bois et vignes comme sont actuellement toutes les possessions qui bordent et confrontent le dit communal.

Autre mémoire du Sieur Heraud sur le communal de Blaye.

Le terrain que l'on nomme le comtau de Blaye, est une lande rase, inculte, et expa..., située à deux lieues de Blaye. Cette comtau (?) contenant sept mille journaux, fut abandonné comme communal aux 25 paroisses de la comté de Blaye, pour par elles pouvoir y prendre leur chauffage DSCN0193.JPG en mort bois et bois mort et y faire pacager [Faire paître] leurs bestiaux. Le contrat passé en conséquence avec Lanquest (?) qui entreprend (?) le dessèchement du Marais de Blaye est du 29 mars 1647.
Par l'usage trop avide que l'on a fait du communal, il est devenu inutile, les bois y ont été extirpés, jusque dans leurs plus légères racines, il en est de même des bruyères, cette vaste étendue n'offre plus aux yeux qu'un sol immense et stérile, six paroisses qui y confrontent y trouvent juste leur avantage en ce qu'elles y lâchent leurs bestiaux et que les propriétaires que l'avoisinent le plus s'en approprient de temps en temps (?) quelques portions, qu'ils joignent à leurs possessions anciennes et qu'ils emploient utilement à différents genres de culture.
Tels sont les motifs qui ont donné lieu à l'arrêt du conseil d'Etat du 3 mars 1764 par lequel S.M. ordonne qu'après l'arpentement fait tant du communal extant [existant ?] que des portions usurpées, il serait procédé par devant M. [de] Boutin alors intendant de Bordeaux au partage du dit communal pour qu'il fût défriché et cultivé, par des acquéreurs, moyennant une somme et denier d'entrée, pour être employé à l'utilité commune des habitants de chaque paroisse, à la charge d'un cens annuel de trois denier par journal, au profit de S. M. à cause de son comté de Blaye, et ce non compris ce qui sera jugé convenable et distraire dans le lot de chaque paroisse apportée du dit (?) communal pour le pâturage des bestiaux.
Le dit sieur Heraud (?) fut chargé par. M. de Boutin de donner ses observations et ses soins pour parvenir au moyen de faire usage de l'arrêt du conseil de 1764. Il fournit les mémoires nécessaires, il abandonné ses affaires et sa famille en ville pour se tenir dans une bien appelé le Candelou (?) paroisse de Générac (?) qu'il possède contigu au communal ; il y réussit, et nourrit à ses dépens toutes les personnes employées aux opérations. M.de Boutin y étant venu lui même, regarda DSCN0194.JPG f° 12 les portions usurpées comme déjà prises en compte pour les paroisses qui les joignent et dit au dit S. Héraud qu'il avait bien fait d'en défricher aussi, lui donnant à espérer le titre d'un nombre de journaux capable de le dédommager de ses soins et de ses créances.

Sur l'approbation de M. Boutin, il fit la dépense de faire renfermer de fossés la partie où il avait défriché, et avec l'aide de la charrue de M. Despommiers (?), il augmenta suffisamment ses défrichements pour finir quelques quartiers de seigle. La longueur de cette pièce rend sa largeur presque imperceptible ; eu égard à la vaste étendue du communal, elle n'est séparée dans sa longueur à la métairie des Andelou, que par un fossé et rien ne l'en distingue qu'un chemin de traverse, qui serait plus ... et aussi commode s'il était porté au delà du fossé qui borne aujourd'hui le communal du côté du midi, le candalou est une métairie (?) neuve que l'exposant à faite, ayant défriché en entier cent dix journaux de landes, qu'il avait ci-devant arrenté de feu M. le Duc de Saint-Simon. Le sieur de la Cour, ingénieur géographe du roi fut envoyé par M. de Boutin au mois d'août 1765 pour, avec deux arpenteurs nommés, faire l'arpentage, tant du communal extant (?) que des portions usurpées, et en lever le Plan, il trouva que les 7000 journaux étaient réduits à 4882 journaux 12 carreaux, de manière qu'il y a de manque et d'usurpé 2117 journaux 60 carreaux dans le plan qu'il fit (le sieur Héraud à ce plan devant lui) il désigna comme une portion déjà prise le nombre de 84 journaux qui formaient l'objet dont le S. Héraud avait dessein de devenir l'acquéreur, aux conditions portées par l'arrêt du conseil de 1764, pensant bien cependant que l'on lui passerait, en compte en compte les dépenses qu'il faisait pour faciliter l'exécution de cet arrêt.

Il y a des assemblées de Paroisses où les particuliers comptant pour rien le bien public, se montrèrent contraires aux v?ux de l'arrêt du conseil. L'indécision et l'espèce de conformité DSCN0195.JPG qui se trouva dans le résultat de ces assemblées ralentirent ces opérations ; c'est ce qui détermina M. Boutin alors à Paris d'écrire au dit S. Héraud en ces termes : "je serai fort aise, Monsieur, que vous me donniez promptement vos observations sur les moyens de parvenir au partage et au défrichement du communal de Blaye, et aux moyens de faire usage de l'arrêt du conseil qui est intervenu. Il est fâcheux qu'une affaire aussi utile languisse depuis aussi longtemps, et je voudrais fort que vous eussiez la gloire de la terminer" Paris le 18 avril 1766.
Quelque temps après, M. de Boutin ayant passé de l'intendance de Bordeaux au ministère, les paysans de l'autre côté du communal, irrités de ce que l'exposant secondait de tout son pouvoir les vues de l'arrêt du conseil d'Etat, et le voyant éloigné de son appui, vinrent en foule ruiner les apparences de la belle récolte qu'il regardait comme assurée, dans la pièce usurpée (on observera que les autres usurpateurs qui sont en grand nombre n'ont point été inquiétés, ils en jouissent comme de leur propre fonds) qu'ils avaient [c'est écrit au singulier] renfermé des fossés et la foulèrent aux pieds, y conduisirent leurs bestiaux et abattirent en partie les fossés ; il rendit assigné les plus aisés devant le juge royal de Blaye, qui les condamna avec dépenses (?) par son appointement du 26 avril 1767. Ils ont fait appel de cet appointement au sénéchal de Guyenne, l'exposant se voyant dépourvu d'un titre à laissé l'affaire là, il n'y a eu aucune poursuite de part ni d'autre, mais par la crainte d'un pareil traitement, il n'a plus osé servir (?) cette pièce ni continuer son défrichement. //

Tableaux

Etat des différentes espèces des Bestiaux qu'il y a dans les paroisses y mentionnées qui sont apportées de
DSCN0196.JPG f° 13 (suite du titre) faire pâturer dans la Comteau (?) commune de Blaye. Savoir (suit un tableau avec le nombre de b?ufs, de vaches, chevaux, brebis ou moutons, etc... et des observations. //

2e tableau : Projet de la division et partage des vacants en Landes de la Comteau de Blaye. Tableau avec nom des paroisses, nombre des taillables et privilégiés, à 60 carreaux par chef, nombre des carreaux pour chaque paroisse, nombre des journées et carreaux pour chaque paroisse.

DSCN0197.JPG suite du même tableau

Notes

//dates du texte : postérieur au 3 mars 1764 et au 17 juillet 1765 et à août 1765 et Texte postérieur au 18 avril 1766
//mémoires à la suite, sur le même texte, il s'agit sans doute de copies...
//ce(s) mémoire(s) a probablement servi à Lemoyne pour rédiger son propre mémoire [# 000007] ; cf. résumé introductif de celui-ci.

Mots-clés

// résistances locales à l'enclosure
// vente de communaux
// Blaye
// projet d'établissement

Numéro de document

000005